Chinoise, Chen Li, Massage, Polie, Soumise au lit, You call me Katsuni, Chinese, Money, Femme tigre, Gucci, Lucy Liu, Gong Li, 2020 vis ma vie, Chintok, Grain d’riz, Manga, bar tabac, Jacky Chan, Bruce Lee, Tu l’tabasses, il sourit, Matheux, mafieux, Mini zizi, Virus c’est qui? Casse-toi où j’te mets la zermi.” Thérèse, Claudia, Maniseng, Lin Fu Xian Sayarath, à l’état civil, “d’origine sino-lao-viet née à Ivry-sur-Seine”, énumère les étiquettes que d’autres ont imaginées pour elle en introduction de son  morceau Chinoise?. Avec son franc-parler argotique, l’artiste les toise, se réapproprie les mots plutôt que de les subir et démonte les clichés qu’ils charrient en deux minutes et cinquante secondes. “Je fais de la musique pour démocratiser des idées”, lance-t-elle sur un ton décomplexé. Thérèse prend la place, que ce soit sur les plateaux télé, invitée à réagir à la sinophobie liée à la pandémie, par le biais de sa chaîne YouTube pour véhiculer un message positif sur le self love ou célébrer l’indocilité féminine, sans parler de ses interventions au long cours dans plusieurs podcasts. 

Thérèse ne s’arrête pas là. Elle multiplie aussi les prises de paroles engagées sur son compte Instagram, vitrine de son intranquillité.

 

 
 
 
 
 
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De celle qui vous pousse à agir. “L’intranquillité chez moi est latente mais je suis très à l’aise avec, je la recherche presque, reconnaît-elle. Dès lors que je suis tranquille, donc dans le confort, j’ai le sentiment de mourir un peu.” En effet, elle a quitté un poste de salariée en CDI et un salaire confortable dans une grande maison de luxe pour la précarité d’une vie d’artiste, d’abord en duo avec La Vague, qu’elle formait avec le compositeur Jonathan Granjon, avant de monter son projet solo. Sa chronique de l’intime s’accompagne d’une dimension politique sur les chansons de son premier EP, Révâlité. “J’aime bien faire ce genre de juxtaposition hasardeuse, dit-elle. Je suis une optimiste pragmatique, j’ai les pieds sur terre et la tête dans les étoiles. À côté de ça, je ne suis pas absolutiste, je ne crois pas en une vérité, donc pas en une réalité, et du coup j’ai accepté que la vie est l’oscillation permanente entre ce qui est et ce qu’on aimerait. C’est ce qui me met en mouvement. Si tu es prisonnier·e du rêve, tu ne fais pas, et si tu es satisfait·e du réel, tu n’as pas de raison de bouger. Moi, je suis dans le faire.

 

Militante “pour la liberté”

Thérèse agit au point de mener tous les combats d’un coup. Quand elle chante la libido féminine éprouvée par la crise sanitaire (Skin Hunger), le geste est éloquent. Derrière le manque de chair, le corps contraint qui ne demande qu’à exulter, elle regrette le processus de déshumanisation de la société qui conduit à l’instauration de lois liberticides. Sur T.O.X.I.C, le premier morceau sous son nom propre, il est question de féminin empêché. Elle y interroge nos contradictions, nos limites, notre capacité à dire stop. “Le monde est un miroir de nous-même, on est notre individualité et l’inconscient collectif, et je ne peux pas m’empêcher de faire cet aller-retour permanent entre les deux pour avancer”, explique-t-elle.

 

Thérèse chérit son double héritage culturel. Elle emprunte à la culture occidentale l’importance de l’épanouissement personnel; à la culture orientale, sa vision holistique de la société et du monde, qui fait s’effacer l’individu devant le collectif. “J’ai besoin de m’épanouir personnellement pour mieux servir le collectif, c’est ce que j’appelle la contamination positive”, résume-t-elle.

Je trouve qu’on est dans une société absolument endormie par l’argent, le confort, le capitalisme.

L’avenir du vivre ensemble se trouverait dans cet équilibre précaire. Elle dit toujours y croire. Entre les lignes, elle regrette que cette notion soit rendue caduque par le manque de responsabilité citoyenne. Sur le refrain de Private Party, elle cible la majorité silencieuse: “Vous êtes tou·te·s invité·e·s à ma fête privée, brisez les chaînes, faites votre part, ne blâmez personne.” Et d’interroger: “ On est constamment en train de réclamer nos droits, mais qui remplit ses devoirs aujourd’hui? Je trouve qu’on est dans une société absolument endormie par l’argent, le confort, le capitalisme. Cette chanson, c’est rappeler qu’on a tou·te·s notre part de responsabilité.

Celle qui jouait les justicières aux poings serrés, le verbe haut, pour défendre ses copines dans la cour de récré, sera militante. Un terme qui achève généralement les présentations la concernant, précédé des mentions musicienne, styliste, modèle. Thérèse s’est choisie cette étiquette pour signifier qu’elle est dans l’action concrète, même si elle lui préfère les qualificatifs “engagée et citoyenne”. Sa voix trouve aujourd’hui un écho jusque dans les collèges et les centres culturels à destination des plus jeunes. “Je les fais parler de sexualité et de genre, de féminisme, d’antiracisme, de vivre-ensemble, de responsabilité citoyenne, de mode, de musique, d’éducation”, dit-elle. Des sujets nourris de ses convictions politiques et personnelles, qu’elle situe à l’intersection de la philosophie humaniste.

 

À militante, elle ajoute “pour la liberté”. Une nuance qu’elle n’idéalise pas mais qu’elle poursuit comme un mantra. “Ça veut dire penser par soi-même et faire les choses en pleine conscience”, pense-t-elle, guidée par la tête, le corps et le cœur, ses garde-fous. Jusqu’à sa dernière prise de parole libre sur l’agent orange, le poison de la guerre du Vietnam, l’artiste ne craint ni la polémique ni le burn out militant, et investit la scène engagée sans compromis. Elle conclut ainsi: “J’ai tous mes membres dedans parce que j’ai choisi d’avoir ce rôle de pont.

Alexandra Dumont 


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